Raccordement au réseau : La sortie du moratoire s’annonce compliquée
Dans l’électricité solaire, mettre fin au gel de quelques mois décidé par le gouvernement devant l’envolée du montant des subventions s’annonce très délicat.
Les experts Jean-Michel Charpin et Claude Trink, auxquels l’Etat avait demandé conseil, ont en effet rendu leur pré rapport hier, sans fournir de solution miracle. Ce texte d’une cinquantaine de pages ne se prononce ni sur les tarifs ni sur un objectif de production d’énergie photovoltaïque pour les années à venir. Et il évoque la nécessité de mettre en place un système transitoire entre celui qui existait et le futur cadre tarifaire…
« Il appartient au gouvernement de décider si l’intérêt de la filière en termes de valeur ajoutée, d’emplois, de bénéfices environnementaux et de perspectives stratégiques justifie les charges induites par de telles cibles de développement », affirme le document, citant les propositions des acteurs qui vont de 300 à 1.000 mégawatts (MW) par an. Les arbitrages définitifs devraient être rendus avant la fin du mois avant de permettre les consultations officielles pour une publication du décret avant le 8 mars. Techniquement, le rapport propose pour les panneaux solaires installés sur les grandes toitures de mettre en place un nouveau tarif d’achat ajusté chaque trimestre en fonction du volume de projets acceptés auparavant. Si l’objectif prévu est dépassé, le prix baisserait automatiquement.
La mission prend une position différente de l’administration sur les grandes toitures en proposant de limiter le recours aux appels d’offres aux installations de forte puissance. Elle recommande également un système de dépôt de garantie ou de caution bancaire afin de s’assurer le sérieux des projets. Surtout, le rapport suggère d’instituer un mécanisme de transition pour éviter une sortie de moratoire trop brutale. « Les projets suspendus qui devront s’insérer dans le nouveau cadre de régulation représentent un volume de 4 à 5 gigawatts », indiquent les auteurs du rapport. « Si tous les projets éliminés sont redéposés le même jour lors de la fin du moratoire, le système va exploser », explique le président du Syndicat des énergies renouvelables, André Antolini.
Pour trouver une solution, la mission propose le lancement d’appels d’offres pluriannuels dans le cas des centrales au sol afin d’offrir des possibilités de rattrapage à un maximum de ces projets.
Le cas des toitures est plus complexe. La nouvelle régulation ne va pas instaurer des quotas, mais des tarifs qui s’ajusteront chaque trimestre en fonction du rythme de développement. D’où le problème. « Si tous les projets étaient déposés à la reprise, la charge de la CSPE engendrée mettrait non seulement en danger l’équilibre économique du système, mais handicaperait également le développement futur de la filière en provoquant une baisse de tarif importante pour les trimestres suivants », explique le rapport.
Pour résoudre ce casse-tête, les auteurs du rapport évoquent la possibilité de tarifs de transition entre les anciens, particulièrement avantageux, et ceux qui seront mis en place début mars par le gouvernement. Ce qui pourrait poser des problèmes juridiques d’égalité devant la loi et nécessiterait de créer une structure spécialisée pour déterminer les projets éligibles aux tarifs de transition. De leur côté, les agriculteurs réclament une commission de rattrapage pour les projets refusés. La mission considère néanmoins que ce système de transition doit rester limité. « Il y a déjà 1.500MW de projets qui vont se réaliser parce qu’ils ont échappé au moratoire. Si on ajoute 1.000 MW de repêchage, on court un risque de nouvelle thrombose », explique un observateur.
Panneaux solaires installés sur le toit d’une coopérative agricole.
Source : Les Echos